journ’Art intime


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CHAPITRE 1 Que faire contre l’élitisme

Que faire contre l’élitisme, fer de lance de l’Art contemporain, quand on est un Artiste ?
D’abord virer les majuscules d’Art et d’Artiste.

Quand j’ai commencé à faire de la sculpture
Je me suis demandé par où j’allais commencer. Nous venions de passer Picasso station, Calder City, Miro Platza, direction l’Art contemporain je devais prendre le train avec les copains et descendre à Conceptuel, après le tunnel.
J’allais donc pour commencer
mettre à bas le musée de papa si je voulais grandir d’un pas . Le Ready made in Duchamp s’ouvrait sous mes pieds comme seule issue pour le matuvu.

Sur ce chemin, les marchands de l’art, les critiques d’art, les missionnaires de la culture,et la cohorte des amateurs d’art, tous de bons tons m’ accompagneront à l’unisson de leurs flonflons .

J’ai commencé par me pencher sur le sujet et à me demander si je pouvais inventer une autre manière de faire. Du jamais vu, mes chers collègues. Du beau jolais de mon tonneau.

Ainsi tout allait se passer entre la sculpture et la sculpture. J’allais devoir manier le pinceau toujours plus haut, pour étonner tout ce beau monde qui satellite autour de l’artiste.

J’ai commencé par écorcer, toutes les branches d’arbres autour de moi dont le tordu m’avait bien plus. Je les peignais de couleurs vives et les assemblais dans l’espace comme de belles notes pour une gavotte. Le résultat était d’un beau à toute épreuve et pouvait aller comme un gant sur un fond blanc. Tout ce petit monde, dont je vous parle se rassemble toujours dans des endroits exprès pour ça.

Sont invités surtout le gratin. Les autres, le tout venant des imbéciles, n’achètent de l’art que du cochon.

Vint l’instant ou une Galerie par l’odeur alléchée, me teint à peu près ce fromage …vous connaissez la suite et la morale de cette histoire.

Ainsi j’étais à ma place d’Artiste et jouet mon rôle comme il se doigt, dans le cul !

Cependant, pendant ce temps …
Il existait une belle revue, » La revue Noire » que je feuilletais de temps en temps. Un numéro était consacré aux sculpteurs africains vivants au Bénin. C’est un très petit pays. Sur la carte, ils n’ habitaient pas loin les uns des autres.

L’envie me prie d’aller voir ailleurs si j’y étais.

Les fétiches dans ce pays éloignent des mauvais esprits.

Je me suis dit, sitôt rentré, dans mes pénates : « je ferai des bonshommes qui font la grimace et je les arroserai d’eau bénite, pour qu’ils nous guérissent » .

Pierre prevost
Le 18 O6 2014


CHAPITRE 2 C’est à Vendre, tout ce baz’art là ?

« Je ferai des bonshommes qui font la grimace …
Et les arroserai d’eau bénite pour qu’ils guérissent »
Façon de parler, vous vous en doutez.
Toutes ces statuettes parlaient le bonhomme.
Elles écoutaient aussi en somme .

J’allais pour fer, j’allais pour fendre , ressusciter les vieilles casseroles,
les moules à tartes, les louches approximatives, les passoires à trou, les scelles véloces, les couteaux féroces, les tuyaux et coude à poil, j’allais féticher le monde de mon armée de fourchettes en marche.

Il est fou, l’affreux loup !
Cependant , le milieu de l’art, mon centre du monde à moi, comme l’éditeur mon cher lecteur, pour mon malheur, celui par qui le mandat arrive , ne l’entend pas de cette oreille.

C’est à Vendre, tout ce baz’art là ?

C’est pour à musée la Galerie, pour enché rire chez le priseur , pour faire de l’Art , de la Majuscule , pour concep tuer le non du père, pour faire fort tunes ?

J’allais devoir montrer patte blanche,
pour être l’élu des marchants d’Arts

Or et hollé de célèbrité .


CHAPITRE 3 l’an’art

Pourquoi faire, pour qui faire
et comment faire.

C’est le plus facile. Quelques ingrédients, du sel, du poivre et une casserole. Tu goûtes et quand c’est bon, tu cries : « à table ! »

C’est à ce moment que ça se complique.

Quel appétit ont les amis ?
Vont-ils aimer le blabla au rhum,
les petites manies de vieilles mamies, la goule farcie, le baisé dans le goût, le rhum des foins, les bonbons mots, la salope riz pour faire joli, la tarte qui flette, et l’eau bénite sur les radis,

Le violon, c’est pour, toit seul, comme une prison.
Tu payes la note quand tu pianotes.

Pour tout vous dire, vous faire sourire et des soupirs
J’irais faire et défaire mes petites sculptures au bord des chemins, pour le passant, au hasard de sa promenade, pour qu’il écoute ma petite chanson sans faire d’emplettes.

Foin des galeries et de leurs châteaux de compagnie.


CHAPITRE 4 Les Objets

Les objets sont nos sujets .Ils nous tiennent par la main.
Les poignées de porte, elles nous racontent des histoires de poignées de mains, les fourchettes des histoires de pique assiettes, les selles de vélo des histoires de fesses. La moindre pelle parle terrassement,et les casseroles d’emmerdements.

Cette familiarité, toute en douceur, loin du labeur, fait des outils, des vieux outils, de bons amis.

Moi qui manipule tous ces objets mis de côté, tel des chômeurs jetés à la rue quand l’heure est venue, je sais que leur histoire, raconte somme toute, aimablement mon enterrement.

Camarades Travailleurs, Travailleuses,
hier nous produisions ensemble. Et si le marteau est toujours là, la faucille, elle, a pris ses ailes loin des champs de blés désenchantés.
Ainsi l’outil raconte la vie.

Lorsque je bricole mes petites sculptures avec tous ces objets, tous ces ustensiles de cuisine mis au rebut
J’ai très envie de m’acoquiner avec le passé pour enfin jouer à la récrée.

Prenons des notes, des anecdotes, des anicroches, des pauses café, des tas de ferrailles, pour composer comme des chansons. Pour fourrager, pour fabriquer, pour imbriquer, des petits oiseaux, des petits poissons, des petits bonhommes. Des faux semblants, des riens en somme, des comme nous sommes. Ressuscitons l’histoire des trucs, loin du devoir et du travail.

Rions un peu. Enchantons les vieilles casseroles, et que ça sonne !


CHAPITRE 5 Chacun son truc

Chacun son truc, chacun son jouet, chacun sa carotte, chacun son bâton.

Ce qui me fait avancer, caracoler labourer et me cabrer, c’est l’art mon pote.

C’est comment dire avec des fleurs, avec des pleurs, avec bonheur ce que la vie m’en dit.
Depuis toujours de Lascaux et Picasso, de François Villon à Jacques Prévert, d’autres le font et le font font. J’ai dans l’oreille tous leurs Flon Flon.

Depuis que je suis môme, je dessine, je colorie, je chante la comptine, je maternelle le temps qui passe.
Je continue. Je n’ai pas rompu. Je suis un grand, je suis un parent, je suis un enfant tout en même temps.
Le jeu m’habite.

Ecrire m’invite depuis toujours. J’avais renoncé à pédaler dans la grimpette et puis voici que le plat de l’Age me remet en selle. J’écris chaque jour un petit texte et le mollet fait des progrès. C’est ma façon de tourner en rond .
Sans doute moi aussi, à ma façon, ai-je voulu jouer ma partition comme du klaxon. Tout au plaisir de l’envie d’en rire .

Pierre
Le 28 10 2014